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ALLO !!
sur une idée d'OLIVIAAllo M’man, jch’sui avec P’pa, il est venu pour 3 jours. T’es dac pour mettre un couvert de plus ?
Il a quitté sa banquise blonde !! Oh ! Excuse-moi.
Deux heures plus tard ils sont là.
Marc est son fils, Le père, une très vieille histoire, n’est jamais venu chez elle, depuis qu’elle a emménagé, elle ne faisait plus partie du circuit des popotes, susceptibles d’une once d’admiration envers lui, ils en étaient plus genre tournoi à mort, cape et épée, ou fusil à lunette.
Elle est en apnée, Ne rien faire paraître, me changer les idées. Tiens se dit-elle ses chaussures sont toujours aussi nickel. Elles ne brillent pas, elles scintillent. Vérification faite, elle ne devait pas se mentir, cette situation n’était pas un canular, ils étaient bien là, tous les deux.
Après avoir reçu une coupe de fleurs qu’elle dépose au centre de la table, ils s’installent, discutent, Le pavé de cabillaud est un délice. Tout se déroule comme si les 35 ans qui les séparaient du précédent repas, obligatoirement houleux s’ étaient évaporés.
Marc, que l’on penserait absent, déguste cet instant, en se fabriquant des souvenirs. Comment peut-il en avoir, ils se sont séparés quand il avait 3 ans, alors les repas en famille ! Agnès est sous le choc.
Veux-tu nous accompagner voir mamie ? C’est pour ça que p’pa est là. Elle est à l’hôpital Agnès ne peut pas refuser ce bonheur à son fils. Pour elle, cette femme avait mené sa vie comme un militaire, avec la notion de devoir accompli, sans réelle tendresse, plus une petite pincée de manipulation.
L’hôpital, est gigantesque, des couloirs qui ressemblent à un échangeur américain, des panneaux lumineux signalant l’unité Quelle étrange journée, elle avait échafaudé d’autres projets : plaisirs, loisirs.
Des pans de sa mémoire mis en sourdine, ressortent, elle remet certaines choses à leur juste place. Fini, enfin, les rancunes ?
…C’est là, elle a été changé de chambre, elle est toute seule maintenant.
Lorsqu’Agnès se penche pour embrasser mamie, cette dernière s’accroche à son cou, la serre très fort, l’embrasse comme jamais elle n’a pu le faire auparavant, de générale elle est devenue un simple troufion. Aujourd’hui elle est dans des draps loin des étoffes satinées qu’elle aimait. Elle a 91 ans. Des 40 précédentes années elle n’avait eu un geste de cet ordre.
Elle mélange le père, le fils, la fille, petite fille, en souriant, donne 70 ans à Marc qui n’a pas encore 40 ans et lui dit, en éclatant de rire, ouvrant grand une bouche dans laquelle les dents sont pour la plupart absentes, tu ne fais pas ton âge!!.
Agnès repêche des souvenirs évadés, ceux de Mamie prennent le large.
Quelques heures plus tard elle s’écroule sur le canapé, curieusement légère, A-t-elle enfin pardonné à cet homme, ému auprès de sa mère, a-t-elle revu en lui celui qu’elle avait tant aimé ? Pas besoin de poser des mots, elle est juste enfin en paix.
La récolte de Des mots, une histoire 80 à placer : apnée – admiration – tournoi – vérification – pardonner – mentir – circuit – chaussures – canular – susceptible – emménager – satiné – banquise – cape – scintiller – pavé
Tags : écriture, histoire, hôpital, pardon, famille
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Commentaires
3Pomme d'humourVendredi 9 Novembre 2012 à 08:36ça sent le vécu pénible ton histoire, tu fais pas dans le léger dis donc...........quant à la mamy à l'hosto, ça m'a rappelé quéqu'chose de pas agréable lors d'une visite impromptue que j'avais faite à la résidence Margaux pour faire plaisir à ma fille ; est-ce que t'as bien digéré le cabillaud après ça ?
Dommage d' avoir attendu 35 ans pour trouver la paix ! M' enfin, hein ? Mieux vaut tard .....................
Pierro Baton, tu as raison, il y a des familles bizarres... et des pas rapides Ma mère est restée plus de 20 ans sans parler à mon frère, pour un mot de travers, pas mal dans le genre !! bisettes
8asphodèle85Vendredi 9 Novembre 2012 à 10:16Les rancunes ont la vie dure et attendre l'agonie pour se réconcilier c'est quand même triste ! Mais mieux vaut l'avoir fait, on a la conscience tranquille !!!
j'ai bien aimé ton histoire, elle m'a ramené a la mienne. enfin presque. mon fils 27 ans son père 62 ans moi 69. mais moi je ne pardonne pas, les coup restent gravés dans ma chair, et mon fils s'en souvient encore. il ne pardonne pas non plus. un jour peut être si son père part avant moi. je pardonnerais... et encore peut être pas.
bisous chère Nicole
Les rapports humains sont parfois difficiles, voir impossibles, mais avec le temps, on parviens parfois à oublier ou pardonner. Tu l'as judicieusement exposé. Même la tête en compote, la grand-mère garde son humour, c'est ça qui importe, finalement.
Très bien raconté. L'arrivée à l'hôpital est très réaliste et un peu angoissante ;-)
j'aime bien la fin quand ton personnage se sent légère et touve la paix ;-)
Ha, les histoires de famille, les rancunes, les pardons...
J'aime beaucoup cette phrase : Agnès repêche des souvenirs évadés, ceux de Mamie prennent le large.
très belle participation un coucou pour te souhaiter une belle fin de semaine ti boOui, les histoires de famille, c'est parfois lourd à porter. Heureusement, ça ne me rappelle rien de connu et pourtant combien de familles se déchirent...
35 ans après, on a changé, on s'est bonifié... Trouver la paix, c'est nécessaire.
Ton texte est touchant et tellement réel mais un peu tristounet...
Bisous d'O.20Monelle69Samedi 10 Novembre 2012 à 10:12En te lisant j'ai eu l'impression de t'entendre... c'est tout toi !!!
Bon week-end - bisous
Une belle page d'émotion et d'humour, qui parfois se retrouve dans la réalité.
Bonne fin de semaine
@mitié
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Que dire de plus .tu m'as touchée avec ce texte..
Bises Nicole